L’incertitude croissante de notre devenir commun, la généralisation du télétravail, les exigences des générations Y et Z, la concurrence croissante des GAFAM, sont autant d’éléments, entre autres, qui remettent en cause le modèle de nos banques traditionnelles. Une des clefs de réussite pour relever les défis à venir sera le manager de proximité, mais pas seulement. Découvrons-le, ensemble ! …
Pour y parvenir nous nous sommes appuyés sur la littérature existante, sur nos expériences en missions ainsi que sur 7 interviews réalisées auprès de spécialistes du management.
Il ressort que les groupes bancaires se doivent davantage de responsabiliser le manager qui est un vecteur. Un vecteur de compétences, un vecteur de sens, un vecteur de réussites collectives et individuelles. Il sera la clef de la réponse humaine au monde BANI.
Concomitamment il convient que l’entreprise accompagne le manager dans sa montée en compétence, pour que ce dernier devienne un expert du management et non plus seulement un expert produit. C’est un changement de culture nécessaire à la transformation et à la pérennisation de nos organisations afin d’embarquer, le manager certes, mais aussi et surtout le collaborateur. Car oui, ils forment une équipe !
Avant toute chose, posons le cadre, accordons nous sur le contexte dans lequel évoluent les managers !
Manager les collaboratrices et collaborateurs de la meilleure manière qui soit n’est pas une question récente. Cependant avec les bouleversements de ces dernières années (crises pandémiques, environnementales et économiques), la prise de décision et la capacité à demeurer à la hauteur de son rôle est de plus en plus difficile pour les managers. Le monde VUCA (Vulnérable, Incertain, Complexe et Ambigu) utilisé par l’armée américaine depuis 1980 laisse peu à peu sa place à l’acronyme BANI. Ce dernier marque d’autant plus fortement l’imprévisibilité de notre monde : Fragile « Brittle », Anxieux, Non linéaire et Incompréhensible. Le futurologue américain spécialiste de la durabilité et de l’avenir de la planète, Alex Steffen, le traduit par « nous ne sommes pas prêts pour ce qui est déjà arrivé.”
« BANI affirme que ce que nous voyons n’est pas une aberration temporaire, c’est une nouvelle phase[1] ».
Les banques, piliers de notre économie, doivent par conséquent plus que toutes autres organisations s’adapter et innover. En première ligne, nous retrouvons le manager de proximité, qui doit préserver le présent et construire l’avenir, avec souvent de moins en moins de moyens. Ainsi les lignes managériales au sein des banques sont interpellées et bousculées[2].
Alors comment réagissent les banques ? Leurs réponses : l’humain !
Une première réponse de la part des groupes bancaires fut de s’inspirer des start-ups et des GAFAM pour repenser les réponses à apporter.
Mettons en perspective l’exemple de la relation client et du modèle de management pour l’illustrer. En 2020, 100 milliards de messages furent échangés quotidiennement sur WhatsApp[3] (vs 50 milliards pour l’année 2014). Selon marketing.fr c’est l’une des preuves que le messaging devient un mode d’échange privilégié. Les banques se sont alors saisies de ce canal pour développer le selfcare et le chatbot afin d’optimiser le service client en période d’affluence. Pour que ce modèle innovant réussisse, le facteur clé de succès est de placer l’humain et le caractère collectif de l’innovation[4] au cœur de leurs organisations. Ce n’est pas un hasard, si en parallèle la stratégie européenne « Europe 2020 » a consacré les compétences des personnes comme étant le principal levier de l’innovation (Commission européenne, 2011). Le rapport du groupe d‘experts de la Commission européenne présidé par Pascal Lamy a lui aussi accordé une importance considérable à la formation pour l’innovation (Commission européenne, 2017).
Une deuxième réponse apportée par les banques a été la valorisation des soft skills, telles que l’empathie, l’écoute ou la gestion des émotions. Leur intégration au sein des formations professionnelles s’est avérée essentielle. Elle a été soulignée lors de nos interviews ainsi que par startégie.gouv.fr n°2022-02 en mai 2022. En 2015 La Tribune a également souligné que « le recrutement des talents de demain ne se limite plus aux seules compétences techniques mais doit intégrer les compétences émotionnelles et relationnelles ». Le management de 2022 repose donc sur une stratégie profondément humaine. Les managers d’aujourd’hui doivent incarner de véritables valeurs humaines pour insuffler au sein de leurs équipes un sentiment de bien-être, de compréhension, et envisager l’avenir sur des bases communes.
Je vous l’annonce mais vous l’aurez compris, c’est la fin du manager à bâton et du manager expert produit. Un changement brutal, dû au Covid est en cours. Place au manager facilitateur et au manager hybride.
Pour beaucoup, devenir manager est la continuité logique d’une carrière réussie. Ils sont alors des managers « experts produits » ou « super vendeurs », ils sont les héritiers d’un système de reproduction sans évolution de la strate managériale. Les managers doivent évoluer de la posture de « sachant » à celle de « facilitateur ».
Les groupes bancaires doivent alors accompagner leurs managers et leur donner les clés pour réussir.
La crise du Covid 19 a fait apparaître un nouveau type d’organisation : le management hybride. Cette organisation s’est imposée aux managers, ils doivent désormais composer avec. Selon une étude Mazars, 73% de la génération Z souhaite organiser librement ses horaires de travail. « L’hybridation constitue un facteur de risque supplémentaire en matière de qualité de vie au travail. Dans ce contexte, les entreprises doivent adopter un management bienveillant, c’est-à-dire se soucier du bien-être des équipes, prendre en compte leurs émotions, capter les signaux faibles malgré la distance… »[7]
Aujourd’hui, le rapport au management a changé, influencé par cet impact générationnel. Les générations Y et Z, qui ont grandi avec la technologie, l’information et les évolutions rapides de notre société, sont en quête de sens, d’indépendance, de co-construction et d’accomplissement de soi.
Le rôle même de manager leader est remis en cause. Il perdure, mais est dépassé -pour les entreprises les plus en avance sur l’évolution des systèmes de management- face aux nouveaux enjeux de notre monde. La résilience des collaborateurs est de mise, certes, mais ils doivent aussi avoir des réponses à leurs besoins d’évolution.
Contrairement à ce que l’on peut penser, le rôle principal d’un manager de proximité n’est pas de « donner du sens ». Non ! Son rôle est de contextualiser, donner des objectifs, accompagner la montée en compétences, prévenir le mal-être de ses collaborateurs afin que le collectif puisse atteindre ses objectifs. Le manager n’est pas un couteau suisse à options illimitées. Il est le facilitateur engageant ses équipes : clef de l’évolution d’une organisation et garant du quotidien.
Depuis la crise du Covid 19, la notion du Future of Work, « le travail de demain » apparaît dans la littérature. Elle caractérise les nouvelles pratiques qui redessinent les contours de la sphère professionnelle. Il s’agit d’organisations novatrices soutenues par l’essor de nouvelles technologies, et de la place qu’occupe désormais le travail dans nos vies comme nous l’avons vu précédemment avec les générations Y et Z. Ainsi le Future of Work engendre des conséquences sur les processus, les organisations et le bien-être des salariés. Le manager a donc toujours un rôle central, il est au cœur de l’organisation et déterminant pour le bien-être des collaborateurs.
De fait, chacun d’entre nous a sa vision du manager idéal. Elle diverge en fonction de nos compétences et de nos expériences. Malgré ces différentes attentes, nous attendons tous deux choses de la part de notre manager : exemplarité et communication.
En effet, la communication permet de résoudre tout ou partie du problème. C’est bien en créant un climat de confiance que collaborateurs et managers pourront échanger, s’engager mutuellement et évoluer ensemble avec une vision commune. Cette dernière ainsi partagée par les membres d’une équipe renforcera les interactions en son sein afin d’enrichir davantage la dynamique collective.
Le manager est donc un vecteur ! Un vecteur de compétences, un vecteur de sens, un vecteur de réussites collectives et individuelles. Il est le lien indispensable à la création d’une équipe soudée qui pourra répondre au monde BANI. Les managers des banques traditionnelles doivent ainsi développer le collaboratif, l’autonomie de leurs équipes et pousser à la transversalité des organisations.
Reste la mise en œuvre ! Et concrètement comment ça se passe ?
Oui le manager de proximité a encore sa place au sein de la banque de détail, mais sous quelles conditions ? Au sein de Fincley consulting nous prônons un manager :
- expert du management,
- formé, formé & formé selon notre Loi des 3F,
- conscient de son rôle au sein de la société dans laquelle il évolue.
Le manager de proximité doit être au cœur de l’organisation afin de développer l’autonomie des collaborateurs, de s’appuyer sur leurs compétences, de les aider à décoder des situations et de les résoudre, avec leur propre savoir-faire C’est ainsi que les banques pourront relever les défis de notre monde BANI.
Pour ce faire nous appliquons la Loi des 3F : Former à la confiance et la responsabilisation à tous les niveaux, Former à oser l’innovation managériale et Former à savoir recevoir et donner.
La confiance et la responsabilisation sont des points essentiels. Selon l’Observatoire des Métiers de la Banque « Les banques ont choisi de se réinventer constamment et en profondeur, avec des évolutions permanentes, à la faveur d’une confiance croissante accordée aux managers[8] ». Chez Fincley nous pensons qu’il faut aller encore plus loin. C’est au collaborateur qu’il convient de donner toute sa confiance. Lui seul, via le levier de l’intelligence collective pourra répondre aux enjeux du monde BANI[9].
Cependant comment donner plus de confiance que le « laisser faire ». L’innovation managériale est un processus collectif, qui passe par une meilleure connaissance des collaborateurs entre eux, d’être au service du salarié, l’inciter à communiquer sur ses erreurs, ses « échecs » et même l’inciter à exprimer son mal-être !
Enfin un manager doit savoir recevoir et donner. Nous pensons qu’un manager doit s’engager auprès du collaborateur à des actions concrètes pour l’aider à atteindre ses objectifs. Nous pensons qu’un manager doit promouvoir le feedback, à commencer par lui. Nous prônons un manager : courageux et formé, pour permettre à ses collaborateurs d’évoluer, de performer et de trouver un épanouissement professionnel.
C’est en cela que le manager doit être conscient de son rôle de promoteur du bonheur. Nous n’évoquons pas ici le « Happiness Manager », non ! Nous évoquons un manager qui a conscience des forces et faiblesses de ses collaborateurs et qui saura les accompagner vers la performance.
De quoi mon collaborateur a-t-il besoin ? Comment puis-je l’aider ? A quoi je m’engage auprès de lui ? Comment mesurer la réussite de nos actions ? Ces exemples de questions sont incontournables lors d’entretiens en bilatérale qui doivent être, entre autres, planifiés, animés par le collaborateur et ritualisés.
Un collaborateur très expert, promu manager, doit être amené à développer ses compétences en management avant la prise de poste. Chaque nouveau manager, peu importe son parcours, devrait être invité par son entreprise, à suivre une formation théorique et pratique où il développerait ses compétences comportementales afin de répondre aux enjeux ‘humains’ et conjoncturels.
Oui le manager est essentiel. Oui le collaborateur est essentiel. Concluons avec ces simples chiffres extraits de l’étude d’Harvard et du Massachusetts Institute of Technology : un salarié heureux est 31 % plus productif, 55% plus créatif, 2 fois moins malade, 6 fois moins absent et 9 fois plus loyal[10].
Managers, Collaborateurs, tous ensemble au travail !
Ludovic SORIN
Manager Fincley Consulting
ludovic.sorin@fincley.com/old2023
[1] Jamais Cascio.
[2] « Le management dans la banque : évolution, révolution ou réinvention », Novembre 2020, Observatoire des métiers de la banque Isabelle AUROY Angéline BAUDE Didier GIROUD Rolland MOUGENOT
[3] 20 Minutes – Publié le 31/10/20
[4] Institut pour la transformation et l’innovation, Les soft skills liées à l’innovation et à la transformation des organisations. Comment agir dans l’incertitude ? Brieuc du Roscoät, Romaric Servajean-Hilst, Sébastien Bauvet & Rémi Lallement
[5] Delphine Theurelle-Stein, Isabelle Barth dans Management & Avenir 2017/5 (N° 95) – étude menée auprès de 309 recruteurs français pour Le Monde, du 11 avril 2016
[6] Etude e Wesuggest pour Baromètre RH et auprès de 311 professionnels du recrutement. Autre exemple : Expressojob.com place en 1 le respect de l’éthique de travail (73 %), puis la loyauté et fiabilité (73 %), l’attitude positive (72 %), le motivation (66 %) et aimer le travail d’équipe (60 %)
[7] Christophe Perilhou, directeur d’activité chez Cegos
[8]« Le management dans la banque : évolution, révolution ou réinvention », Novembre 2020, Observatoire des métiers de la banque Isabelle AUROY Angéline BAUDE Didier GIROUD Rolland MOUGENOT
[9] « Brittle » Fragile en anglais, Anxieux, non Linéaire et Incompréhensible.
[10] https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-comment-rendre-ses-equipes-heureuses-1037248